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Littérature

[Nouvelle] L’enveloppe

Il pleuvait sur les nombreux clients venus s’entasser à la hâte. La perspective des fêtes de fin d’année les avait emmenés à s’agglutiner par grappe autour des vitrines de jouets et sur les trottoirs glacés des rues commerçantes. Des guirlandes avaient temporairement pris la place des étoiles et leurs couleurs s’alternaient dans un joyeux feu d’artifice. Un père Noël, visiblement aux portes de la retraite, s’exclamait à chaque passage de bambins, et attisait la moquerie des adultes tandis qu’ils provoquaient les larmes des progénitures les plus timides. Là, devant la boutique de bonbons, des hymnes étaient entonnées par une chorale de jeunes chanteurs, entraînée par un prêtre dont la fierté agitait les bras.

Juste à côté de cette effervescence sans nom, les caniveaux emmenaient l’eau vers une petite rue adjacente. Le bruit y parvenait à peine malgré la proximité. On n’y percevait que le brouhaha sourd d’une foule en quête de plaisirs impulsifs. Les lampions avaient laissé place à des lampadaires qui projetaient une lumière blafarde sur les bâtiments défraîchis. Les gouttières libéraient le trop-plein de pluie dans un dégueulement bruyant. Une chaussure fut éclaboussée. C’était celle d’un homme en noir. Il portait une veste assez chic pour qu’un éventuel passant se questionne sur sa présence en ces lieux. Son pas déterminé ne l’empêcha pas de secouer la jambe, agacé par la sensation froide qui avait pénétré dans son soulier.

Quand il parvint près de l’immeuble portant le n°58, il arrêta brutalement sa course. Son regard dévia prudemment à droite, puis à gauche. Personne. Il poussa la lourde porte qui lui ouvrit le passage vers un couloir aussi étroit que fatigué. C’est là-haut qu’elle attendait, dans un petit studio coincé entre les tuiles et le parquet. Il monta, frappa à la porte. Elle ouvrit, même regard suspicieux. Aucune lumière ne venait éclairer l’endroit, hormis celle balancée par un réverbère accroché à la façade de l’immeuble d’en face. Mais il la reconnut immédiatement. Il la rejoignit sur le canapé, un vieux convertible que le chat avait élu comme griffoir. Les accoudoirs étaient marqués par les frottements répétés et le tissu avait été terni par le temps. Il ne voyait pas le reste de l’appartement, plongé dans une pénombre inquiétante. Le visage de son hôte était traversé par un rayon de lumière orange.

« Tu as l’enveloppe ? lança-t-il.
– Je dois m’assurer de ta bonne foi avant. Montre-moi la preuve du bon accomplissement de ta mission… »
Il releva la manche de son costume et découvrit les stigmates encore frais de sa lutte. Elle sourit.
« Tiens, voici ton dû. Disparais maintenant. »

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*** À MANIPULER AVEC PRÉCAUTION *** Amoureuse des mots, du langage et de tout ce qu'il est capable de transporter, je manie les règles, les limites pour mieux les adopter et les plier à ma volonté. Convaincre, persuader, combattre et pacifier, informer ou tout simplement établir une relation, les possibilités sont infinies. Rendez-vous sur mon terrain de jeu : Wriiters

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